LA «RèGLE DES 3 V», LE MEILLEUR RéGIME ALIMENTAIRE POUR SOI ET LA PLANèTE

Commençons par un double constat. D’abord, les aliments que nous consommons, leur production et le gaspillage ont un impact majeur sur la planète. Ensuite, certaines de nos habitudes alimentaires sont mauvaises pour notre santé. Trop sucrées, trop riches en mauvais gras et composées en grande partie d'aliments ultra-transformés... «En 2030, 50% de la population mondiale pourrait souffrir de surpoids et d'obésité, avertit Émilie Steinbach (1), neuroscientifique et Docteure en Biologie Intégrative. C'est un facteur de risque majeur de diabète de type 2, de maladies cardiovasculaires, de dépression et de déclin cognitif.»

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«Pouvons-nous nourrir une population future de 10 milliards de personnes avec une alimentation saine dans les limites planétaires ?» C’est pour répondre à cette question que la Commission EAT-Lancet avait été formée. En 2019, 37 experts en santé, nutrition, durabilité environnementale, systèmes alimentaires et gouvernance économique et politique, venant de 16 pays différents, dévoilaient alors un «régime alimentaire planétaire», un mode d'alimentation capable de respecter les limites planétaires durables, tout en étant basé sur des analyses nutritionnelles approfondies. Comment intégrer ces recommandations dans notre quotidien ? Comment manger sainement et durablement ? En suivant «la règle des 3 V», élaborée par Anthony Fardet, docteur en nutrition humaine, chercheur en alimentation préventive et durable (2) et Edmond Rock, directeur de recherche à l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae). Elle consiste à manger «vrai, végétal et varié»

Manger vrai

Manger «vrai» signifie simplement diminuer sa consommation d’aliments ultra-transformés, c'est-à-dire conçus par les industriels agroalimentaires -avec des agents cosmétiques pour modifier goût, couleur, arôme et/ou texture - et dont beaucoup n’existent pas comme tel à l’état naturel. «Ces produits, globalement, n'apportent que peu de fibres, de vitamines et de micronutriments à notre organisme, sont souvent trop sucrés et contiennent des additifs cosmétiques, souligne Anthony Fardet. Consommés à l’excès, ils sont nocifs pour la santé globale, c’est-à-dire humaine et planétaire.» La majorité des 210 études épidémiologiques réalisées sur les aliments ultra-transformés ont en effet rapporté un lien significatif entre la consommation excessive de tels produits et le risque accru de nombreuses maladies chroniques et de mortalité précoce.

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Sans oublier que «l’ultra-transformation est associée à des systèmes alimentaires non-durables qui réduisent la biodiversité et favorise les monocultures et l’élevage intensif», ajoute le spécialiste. La quantité de déchets plastiques et le gaspillage qu’impliquent ces productions sont aussi colossaux. Voilà pourquoi Anthony Fardet préconise de limiter la consommation de tels aliments à un ou deux par jour.

Pour manger «vrai», Anthony Fardet préconise trois autres règles pour la santé. Préférer les aliments sous forme solide à liquide «pour favoriser la mastication et la sensation de satiété». En effet, consommer une orange entière à la place d’un jus d’orange pressée apporte, par exemple, de meilleurs apports en fibres et en vitamines, tout en régulant mieux la réponse glycémique. De plus, il conseille de «manger des féculents complets plutôt que leur version raffinée, et d’éviter d’avoir la main trop lourde sur le sel, le sucre et le gras ajoutés lorsque l’on cuisine».

Manger végétal

Pour le bien de la Terre, il est inévitable de réduire notre consommation d’aliments d’origine animale. «Végétaliser nos assiettes réduit de manière drastique les émissions de gaz à effet de serre, l’utilisation de l’eau et l'empreinte environnementale globale, insiste Anthony Fardet. Il n’y a tout simplement pas d’autres solutions pour préserver notre planète.» En comparaison, la production d’un kilo de viande de bœuf émet 99 kilos de COéquivalent, celle d’un kilo de légumineuses émet moins d’un kilo de COéquivalent.

Les bénéfices se retrouvent également sur notre santé. «Il a par exemple été démontré que le régime MIND, qui associe le régime méditerranéen traditionnel au DASH (régime contre l'hypertension), et est principalement composé d’aliments végétaux (céréales complètes, fruits et légumes, légumineuses, noix et graines), est associé à une réduction du risque de maladies neurodégénératives et un ralentissement du déclin cognitif», assure la neuroscientifique Émilie Steinbach. À l’inverse, la consommation de viande rouge est associée à des risques d’obésité, de maladies cardiovasculaires et de cancer.

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Ici, pas question de réduire notre apport total en protéines. «Il s’agit de remplacer une certaine quantité de viande par des aliments protéinés d’origine végétale», indique la neuroscientifique. Parmi eux, on trouve les haricots secs, les lentilles, les oléagineux, les fruits à coques ou encore les produits à base de soja... «Contrairement aux idées reçues, ces aliments n’ont pas toujours un apport en protéines inférieur à celui la viande, précise Émilie Steinbach. De nombreuses études montrent d’ailleurs que le régime d’un végétarien est généralement de meilleure qualité nutritionnelle que celui d’un omnivore, puisqu’il offre une plus grande variété d’aliments et donc une meilleure diversité de nutriments.»

Manger varié

Et c’est tout l’objet de la dernière dimension des 3 V. Varier notre alimentation est en effet primordial pour stimuler la biodiversité, la polyculture et soutenir différents écosystèmes. «Aujourd’hui, la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) rapporte qu’il n'y a que 12 variétés animales et végétales qui fournissent plus de 50 % des calories quotidiennes aux 8 milliards d'êtres humains sur Terre, constate le chercheur Anthony Fardet. Or, il existe des milliers d'espaces végétales et animales sur la planète.» D’où l’importance de modifier nos habitudes alimentaires.

Diversifier nos assiettes favorisera aussi un meilleur état de santé. «Plus on se nourrit d’aliments variés, plus on apporte une série complexe de différentes molécules qui nourrissent la diversité de notre microbiote, ce qui contribue à améliorer notre santé intestinale et globale», informe Émilie Steinbach.

En pratique, les spécialistes recommandent de consommer entre 35 et 40 aliments différents par semaine. «Ce qui correspond à environ trois produits divers par catégorie d'aliments», détaille Anthony Fardet. Ainsi, dans le groupe des céréales, on peut consommer du blé complet, du riz complet et du maïs. Au sein des légumineuses, on peut choisir de manger des lentilles, des haricots et des pois chiches. Parmi les fruits, on peut se tourner vers les bananes, les pommes et les poires... «Ainsi, on s'assure de remplir tous nos besoins nutritionnels grâce aux apports en antioxydants, en fibres, en minéraux et en vitamines», poursuit le docteur en nutrition. Ce dernier invite enfin à consommer des fruits et légumes issus de l'agroécologie, locaux et de saison.

(1) Émilie Steinbach tient le compte Instagram @TheBrainGutScientist, où elle vulgarise les connaissances scientifiques quant à l'impact de notre mode de vie sur notre cerveau.

(2) Anthony Fardet est également l’auteur du livre Pourquoi tout compliquer, bien manger est si simple, aux éditions Thierry Souccar, 270 pages, 19,90 €.

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